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Les pro-Ouattara à Abidjan, Gbagbo sommé de partir


Lemonde.fr avec AFP | 31.03.11 |

Les forces d’Alassane Ouattara, le président de Côte d’Ivoire reconnu par la communauté internationale, livraient bataille à Abidjan dans la nuit de jeudi à vendredi pour s’emparer des derniers bastions de son rival, Laurent Gbagbo, au bord de la défaite après quatre mois d’une sanglante crise post-électorale. Au quatrième jour d’une offensive éclair, les forces pro-Ouattara, entrées dans la nuit dans la capitale économique, cherchaient à s’emparer du palais présidentiel et de la résidence de Laurent Gbagbo, où ce dernier se trouvait en principe, ont constaté des journalistes de l’AFP.

Vers minuit, le porte-parole du ministère de la défense de M. Ouattara, le capitaine Léon Kouakou Alla, a affirmé que ses forces avait pris le contrôle de la télévision d’Etat RTI. "Nous nous sommes emparés de la RTI, les Forces républicaines sont à la RTI", a-t-il déclaré. Plusieurs habitants ont confirmé la coupure du signal. M. Gbagbo "doit partir, c’est l’objectif à atteindre. Donc on doit s’emparer du palais présidentiel au quartier du Plateau et de la résidence présidentielle de Cocody", a ajouté le capitaine Alla. "Il reste à savoir si (...) le camp Gbagbo comprend que le jeu est fini ou s’il préfère jouer Fort Alamo", a déclaré à l’AFP un diplomate occidental.

"Il y a des combats à l’arme lourde dans le périmètre de la résidence de Gbagbo", située dans le quartier chic de Cocody, a déclaré un habitant à l’AFP. Depuis 22 heures, heure locale (minuit à Paris), "les tirs sont intenses, et ça tire dans quatre ou cinq directions à la fois. Il y a du monde", a-t-il ajouté.

Les combats ont commencé à moins d’un kilomètre de la résidence, autour de la cité universitaire Mermoz, un fief des partisans de M. Gbagbo, et s’étendaient dans ce secteur où est située la télévision d’Etat RTI, a-t-il indiqué. La résidence de M. Gbagbo est essentiellement protégée par des membres de la garde républicaine, une unité d’élite lourdement équipée, selon des sources concordantes.

ULTIMATUM ET COUVRE-FEU

Alassane Ouattara n’a jamais été aussi près de la victoire : au quatrième jour d’une offensive militaire éclair, alors que son rival, le chef d’Etat sortant Laurent Gbagbo, gardait le silence, les troupes de M. Ouattara présentes dans la moitié nord depuis 2002 ont pris le contrôle de la grande majorité du pays et encerclent Abidjan, tandis que le chef des armées de Laurent Gbagbo a fait défection.

Dans la soirée de jeudi, le gouvernement d’Alassane Ouattara a imposé un couvre-feu à Abidjan et ordonné la fermeture, jusqu’à nouvel ordre, des frontières terrestres, aériennes et maritimes du pays. La capitale économique, hérissée de barrages de jeunes partisans de M. Gbagbo, était sous haute tension, la plupart des habitants préférant rester chez eux dans la crainte d’une bataille finale dans cette métropole d’au moins quatre millions d’habitants. Le blocus de l’Hôtel du Golf à Abidjan – qui servait de base à Alassane Ouattara depuis l’élection présidentielle du 28 novembre – a été levé jeudi. "Les 50 000 policiers et gendarmes armés ont tous quitté Gbagbo. Il n’y a que les forces spéciales de la garde républicaine et les Cecos (commandos de forces spéciales)" qui restent, a déclaré le chef de l’ONU   en Côte d’Ivoire, Choi Young-jin sur, France-Info, précisant que les forces encore fidèles à Laurent Gbagbo sont positionnées au "palais présidentiel" et à la "résidence" de ce dernier. Dans la soirée, les troupes de l’Onuci ont pris le contrôle de l’aéroport d’Abidjan.

Le camp d’Alassane Ouattara a par ailleurs pris la parole dans de nombreux médias pour accentuer sa pression psychologique, et en premier lieu le président élu Alassane Ouattara, qui a, dans un discours télévisé, tendu la main aux "hésitants", qu’ils soient "officiers généraux, officiers supérieurs, sous-officiers, militaires du rang", et les a appelés à se "mettre à la disposition" de leur pays et à "rallier" leurs "frères d’armes, des Forces républicaines".

A Paris, sur BFM-TV, le nouvel ambassadeur ivoirien nommé par M. Ouattara, Ally Coulibaly, a assuré, à propos de M. Gbagbo, qu’"il sera traité avec toute l’humanité qu’il faut". "Rien n’arrivera à Laurent Gbagbo, a-t-il affirmé. C’est ce que le président Alassane Ouattara a demandé : qu’il ne soit en aucun cas inquiété et que son intégrité physique soit préservée."

En direct à plusieurs reprise sur France 24, le premier ministre d’Alassane Ouattara, Guillaume Soro, a lancé en fin de journée "c’est terminé", laissant à Laurent Gbagbo jusqu’à 19 heures locales (21 heures, heure de Paris) pour quitter le pouvoir. L’heure passée, Alassane Ouattara a décrété un couvre-feu à Abidjan, de 21 heures à six heures du matin, de jeudi soir jusqu’à dimanche matin. Trente minutes après l’expiration de l’ultimatum, Alain Toussaint, conseiller de Laurent Gbagbo, a indiqué que ce dernier n’avait nullement l’intention de démissionner.

Depuis le début de la crise post-électorale fin novembre, qui a fait près de 500 morts selon le dernier bilan de l’ONU  , M. Gbagbo, au pouvoir depuis 2000, a résisté aux sanctions internationales, tant politiques qu’économiques. Mais l’offensive militaire des derniers jours et la défection, mercredi soir, du chef-d’état major des armées, le général Philippe Mangou, qui s’est réfugié à l’ambassade d’Afrique du Sud, semblent avoir été décisives. Après de nouvelles défections au sein de l’armée et de la police, jeudi soir, les heures du régime Gbagbo semblaient donc comptées.


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Publié sur OSI Bouaké le vendredi 1er avril 2011

 

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