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Côte d’ivoire : Bras de fer et voie périlleuse


Premier round en Côte d’Ivoire, avantage Ouattara

Libération - 14/12/2010 - Par Thomas Hofnung

Le statu quo ne pouvait pas durer éternellement en Côte d’Ivoire. Alassane Ouattara, le président reconnu et soutenu par la communauté internationale, mais coincé dans son réduit de l’hôtel du Golf, sait pertinemment que le temps joue contre lui. Son camp semble avoir décidé de passer à l’action en sollicitant le Premier ministre Guillaume Soro, déterminé à monter en première ligne. Ce dernier a annoncé qu’il comptait installer le nouveau directeur de la Radio-télévision nationale ivoirienne (RTI) ce jeudi, puis qu’il prendrait ses quartiers à la "Primature" (siège du Premier ministre) le lendemain. Autant dire, s’il passe vraiment à l’acte, qu’on se dirige tout droit vers une confrontation avec les forces loyales au président Gbagbo, qui assurent la protection de ces deux lieux.

Lundi, le premier round s’est déroulé aux abords de l’Hôtel du Golf et il a tourné à l’avantage du camp de Ouattara. Le régime de Gbagbo avait décidé d’installer des barrages sur la route menant au QG de l’ancien Premier ministre. Il semble que ce "test de détermination", selon l’expression d’un diplomate en poste à Abidjan, ait été initié suite à la présence de ministres nommés par Alassane Ouattara à une récente réunion de la Banque centrale des Etats d’Afrique de l’Ouest (BCEAO).

Dans la matinée, un convoi de collaborateurs de Soro a été bloqué à l’un de ces barrages. Les ex-rebelles des Forces nouvelles (FN), dont une cinquantaine de soldats sont déployés au Golf hôtel, sont alors immédiatement intervenus, pensant que Guillaume Soro lui-même était en danger (en réalité, il n’était pas présent). Chaude ambiance, puisque des tirs de sommation ont eu lieu. De source concordante, les militaires de la Garde républicaine (pro-Gbagbo) auraient détalé, laissant sur place armes et véhicules, immédiatement récupérés par les FN. La Mission des Nations unies en Côte d’Ivoire (Onuci) a dû par la suite mener une mission de bons offices pour que ce matériel soit restitué à ses propriétaires, en échange de la mise en place de postes de contrôle (ou barrages filtrants) allégés.

Mais la partie de bras-de-fer ne se joue pas seulement à Abidjan. Les FN essaient de mobiliser les populations du nord pour organiser une "marche verte" sur Yamoussoukro. Les manifestants ont déjà commencé à se regrouper à Bouaké pour marcher, normalement ce mercredi, sur la localité de Tiébissou, avant de prendre la direction de Yamoussoukro, la capitale administrative du pays et ville emblématique de Houphouët-Boigny, où se dresse la célèbre basilique.

Pour sortir de l’impasse actuelle, le camp Ouattara s’engage dans une voie périlleuse. Ses partisans sont-ils prêts à se mobiliser massivement au risque de leur vie ? Une tactique risquée, qui pourrait se retourner contre ses auteurs en cas d’échec, leur impuissance étant étalée au grand jour. Signe d’inquiétude dans le camp Gbagbo : il a annoncé l’arrivée imminente d’une nouvelle médiation de l’Union africaine (UA), demandée par les Nations unies.


Publié sur OSI Bouaké le mardi 14 décembre 2010

 

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