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Côte d’Ivoire : Les femmes riches plus infectées que les pauvres - étude


ABIDJAN, 14 février 2007 (PlusNews) - Les femmes issues des foyers aisés en Côte d’Ivoire sont plus touchées par le VIH  /SIDA   que celles des ménages défavorisés, a révélé une enquête nationale, un phénomène jugé inquiétant par les activistes de la lutte contre l’épidémie.

L’enquête sur les indicateurs du sida   (EIS) en Côte d’Ivoire, menée entre août 2005 et décembre 2006 sur un échantillon de 5 772 femmes et 5 148 hommes âgés entre 15 et 49 ans, a révélé que 8,8 pour cent des femmes vivant dans les ménages les plus riches étaient infectées au VIH  , contre 3,6 pour cent chez celles issues des foyers les plus pauvres.

Rendue publique jeudi par le ministère ivoirien de la Lutte contre le sida  , cette étude, réalisée par l’Institut national de la statistique avec l’assistance technique de l’organisme américain Ocr Macro International, spécialisé dans les enquêtes de démographie et de santé, a également constaté une tendance générale à la féminisation de l’épidémie, avec plus de deux femmes infectées pour un homme -respectivement 6,4 et 2,9 pour cent.

Le taux élevé de prévalence du VIH   chez les femmes issues des foyers aisés pourrait s’expliquer en partie par « le fait que ... plus les gens sont riches, plus ils ont tendance à se soustraire aux normes sociales », ont suggéré les auteurs de l’enquête, lors de la publication du document, ajoutant que le confort financier incitait ces populations à penser qu’en cas d’infection, elles avaient de toute façon les moyens d’être suivies médicalement.

Jeannette Bouabré, présidente de l’Ong Djollo des femmes du Haut Sassandra, dans le Centre-Ouest du pays, a estimé que « cette propagation du sida   en milieu aisé s’explique [par] le comportement et le pouvoir d’achat des composantes du couple. Parce qu’ils ont les moyens, ils se croient tous permis. »

« Nous sommes inquiets de cette nouvelle donne. Surtout pour des personnes qui disposent de tous les moyens de communication pour s’informer sur les ravages du fléau. Nous ne savons pas ce qui peut leur manquer », a-t-elle dit.

Les populations issues de milieux plus aisés ont tendance à moins s’informer que les autres sur le VIH  /SIDA  , ont souligné les auteurs de l’enquête, et les messages de sensibilisation sur l’épidémie, longtemps présentée comme une « maladie de pauvres », semblent mieux passer parmi les catégories moins favorisées, ces dernières se sentant plus menacées.

Annick Mady, présidente de l’Association de soutien à l’autopromotion sanitaire et urbaine, l’Asapsu, a suggéré la mise en place de programmes de sensibilisation destinés spécifiquement aux ménages aisés, notamment à travers des témoignages de personnes infectées issues de ce milieu.

« Ces hommes... pensent qu’avec l’argent, ils peuvent tout faire. Ils se payent le luxe de s’offrir des maîtresses », a-t-elle regretté.

L’enquête EIS a repris les statistiques de prévalence du VIH   annoncées en juin 2006 par les autorités ivoiriennes, et qui évaluent le taux d’infection en Côte d’Ivoire à 4,7 pour cent de la population, en baisse par rapport aux estimations précédentes de sept pour cent en 2003.

Ces chiffres sont mis en doute par plusieurs organisations internationales, qui pensent que le taux de prévalence serait plus élevé, dans ce pays coupé en deux depuis une tentative d’insurrection armée en septembre 2002, et où la majorité des structures sanitaires de la moitié nord, sous contrôle rebelle, ont été détruites, pillées ou abandonnées par le personnel médical, réfugié dans le sud.

Le Programme commun des Nations unies sur le sida  , Onusida  , a évalué le taux d’infection au VIH   en Côte d’Ivoire à 7,1 pour cent de la population adulte en 2005.

La Côte d’Ivoire reste l’un des pays les plus touchés de la sous-région, et les conclusions de l’enquête EIS prouvent que les efforts déployés pour freiner la propagation de l’épidémie doivent être intensifiés et dirigés vers toutes les couches de la société, a analysé Christine Adjobi, ministre de la lutte contre le sida  .

« Nous avons besoin encore de sensibiliser les populations. Car, [quand] nous parvenons à intégrer et convaincre un milieu, d’autres foyers explosent. C’est le cas aujourd’hui des femmes des [foyers] les plus riches. L’on doit chercher désormais à comprendre les causes de l’infection dans ce milieu », a déclaré la ministre.


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Publié sur OSI Bouaké le samedi 3 mars 2007

 

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