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Le parcours farfelu de Flavien, l’apprenti djihadiste nantais



Par Fabienne Béranger - Publié le 18/10/2014 -

Flavien est né en Corée du Sud il y a 27 ans. Orphelin, il est adopté à l’âge de 2 ans par un couple de nantais. C’est à l’adolescence qu’il bascule dans la délinquance, condamné treize fois, notamment pour des vols avec armes et violence, avant de se convertir à l’islam, de se radicaliser puis de devenir le premier jihadiste français jugé à son retour de Syrie.

En 2011, emprisonné pour délit de droit commun, il demande à un professeur de physique comment fabriquer une bombe. A sa sortie du centre pénitentiaire de Nantes en 2012, il décide de partir faire le djihad. Il tentera à six reprises de rejoindre la Syrie optant pour différents trajets.

Il concède avoir appris le maniement de son pistolet-mitrailleur, quelques rudiments d’art militaire, comme se déplacer à la façon des commandos, mais rien d’autre. Il explique devant le tribunal avoir fait "un peu de surveillance et de la police. Je surveillais les frères et les journalistes".

Il ne restera en Syrie qu’une dizaine de jours "parce que j’avais envie de fumer, là-bas, je pouvais pas". Il poursuit : "J’ai eu beaucoup de mal à ne pas fumer, parce que fumer c’était interdit dans la katiba (un bataillon, NDLR). J’avais emporté des Nicorettes, mais ça n’a pas suffi. Alors j’ai laissé mon arme à mon émir et je suis parti" explique-t-il au tribunal.

Ce serait visiblement plutôt sa maladresse à manier les armes qui aurait amené ses instructeurs à le mettre à la porte de son bataillon. Nos confrères du Lab racontent que "l’incompétence du Français, totalement novice en la matière, faisait même peur à ses instructeurs."

Son erreur : avoir raconté son expérience sous le nom de "Abdel Fattah", à un journaliste du Temps qu’il rencontre de côté turc de la frontière. Il attire ainsi sur lui l’attention de la DGSI, les services de renseignement français. Mis sur écoute, les enquêteurs l’interpellent en janvier 2013.

Vendredi, au tribunal correctionnel de Paris, le procureur a requis une peine de sept ans de prison ferme à l’encontre de Flavien Moreau.


Le parcours chaotique du premier Français accusé de jihad en Syrie

Texte par Charlotte OBERTI - 18/10/2014 -

Le premier procès d’un Français jugé pour avoir rejoint des groupes jihadistes en Syrie s’est tenu vendredi à Paris, au lendemain de l’adoption par le Sénat d’un projet de loi anti-jihad. Le jeune homme encourt sept ans de prison ferme.

À l’heure où la France s’arme d’un dispositif législatif en mesure de contrer les départs vers la Syrie de citoyens potentiellement dangereux, le procès à Paris, vendredi 17 octobre, d’un jihadiste s’étant rendu sur place tombe à pic. Flavien Moreau, 27 ans, est accusé d’association de malfaiteurs en vue de préparer des actes de terrorisme. Le jeune homme, qui est le premier Français jugé pour avoir rejoint les combattants islamistes en Syrie, fait figure d’exemple : la veille de l’audience, le Sénat a adopté un projet de loi anti-jihad visant à interdire la sortie du territoire de candidats potentiels.

Flavien Moreau, contre qui sept ans fermes ont été requis et qui sera fixé sur son sort le 13 novembre, n’a passé qu’une quinzaine de jours sur zone malgré de nombreuses tentatives pour rallier les mouvements jihadistes. Debout dans le box des accusés, ce Franco-Coréen à l’élocution hésitante et à la position voûtée commente tant bien que mal ses nombreux déplacements effectués ces dernières années. Allemagne, Turquie, Jordanie, Israël, Tunisie, Angleterre, Irlande, Autriche, Liban, Suisse, Belgique, Luxembourg, Bulgarie… Ses pérégrinations incessantes, souvent rythmées par les exclusions et refus d’entrée dans les différents pays, ont fini par alerter les services de renseignement français.

À une seule reprise, en novembre 2012, l’homme aux multiples surnoms - "Kim", "Adam", "le Chinois" ou encore "Abou Souleyman" selon les circonstances - est parvenu à entrer en Syrie, où combat actuellement son frère. Au sein d’une katiba (groupe de combattants) et armé d’un AK-47, il a, selon lui, "surveillé les frères et les journalistes grâce à un brevet de secouriste". Au bout d’une quinzaine de jours, il a quitté ce pays tant convoité, en raison, dit-il, de son addiction à la nicotine. "Je ne pouvais pas fumer là-bas", assure-t-il, sous les regards peu compréhensifs des juges.

Prudence et impulsivité

Pourtant, dès le mois de décembre 2012, il tente de nouveau et avec acharnement de rejoindre le front. Mais il essuie quatre échecs successifs, refoulé par voie aérienne ou bien terrestre à Tunis, à Istanbul, à la frontière bulgaro-turque ainsi qu’à Beyrouth.

Dans le collimateur des autorités, Flavien Moreau redouble de vigilance : il va jusqu’à changer trois fois d’hôtel dans la même journée et se déplace avec de nombreux téléphones sur lui dont il change régulièrement les puces. Mais son impulsivité le trahit. En 2011 déjà, alors incarcéré pour des faits de vols aggravés et de violences, il avait dit à l’un de ses professeurs en prison qu’il voulait apprendre à fabriquer une bombe. Plus récemment, lors d’un vol aérien, il attire l’attention en se disputant avec le personnel naviguant à qui il reproche de vendre de l’alcool. En novembre 2012, il raconte ses ambitions, sous le nom de guerre d’"Abdel Fattah", à un journaliste suisse rencontré côté turc de la frontière, lequel l’a rapporté dans un article du quotidien "Le temps", sous le titre : "Les premières armes d’un jihadiste".

Fin janvier 2013, l’apprenti combattant comprend que l’étau se resserre sur lui et décide de rentrer en France, dans le but de se procurer de faux papiers, mais il est interpelé. Deux lingots d’or, huit pièces d’or et 5 080 euros en liquide sont trouvés sur lui.

"Un musulman radical qui veut aller en Syrie n’est pas forcément un terroriste"

Ce musulman radical, qui s’est converti après avoir discuté "de l’islam avec son ancien colocataire arabe", indique avoir développé un intérêt profond pour la Syrie via, dit-il, la télévision. "J’ai beaucoup entendu parler de la Syrie, cela m’a donné envie d’y aller. Les médias et les intellectuels voulaient en fait se débarrasser de nous, les musulmans et les salafistes", clame-t-il.

Son avocat, Me Pierre Darkanian, affirme quant à lui que son client n’a jamais eu de dessein terroriste. Il précise d’ailleurs qu’être un musulman radical et vouloir se rendre en Syrie ne signifie pas forcément être terroriste. "On essaye aujourd’hui de pénaliser des intentions ou ce qu’on imagine être des intentions terroristes", expliquait ce dernier avant l’audience.

Une version angélique que reprend également l’intéressé. Mais si Flavien Moreau se défend de cautionner la violence - quand on lui pose la question, il indique même qu’il condamne les attentats du 11-Septembre -, il ne se dit en revanche pas gêné par le groupe terroriste Al-Qaïda. "Je ne suis pas pour la violence, je suis pour faire appliquer la justice d’Allah", assure-t-il.

Selon lui, d’ailleurs, les attentats perpétrés en territoires occidentaux, à l’image des attaques de Londres en 2005, n’ont fait que braquer les gouvernements et entraver sa route. Fin 2012, depuis Francfort, après avoir été expulsé d’une des destinations dans lesquelles il voulait se rendre, il pestait au téléphone – sur écoute – avec sa mère : "Ce ne sont pas des connards qui vont m’empêcher d’aller où je veux."


Flavien Moreau, premier jihadiste rentré de Syrie jugé à Paris

Le Parisien - 17.10.2014 -

Flavien Moreau, premier apprenti jihadiste français jugé vendredi à Paris pour avoir rejoint en Syrie un groupe combattant, inquiétait depuis longtemps les enquêteurs : en 2011, emprisonné pour délit de droit commun, il demandait à un professeur de physique comment fabriquer une bombe.

Les juges de la 16ème chambre du tribunal correctionnel de Paris ont retracé le parcours chaotique de ce jeune homme d’origine sud-coréenne, adopté à 2 ans par une famille française, condamné treize fois, notamment pour des vols avec armes et violence, avant de se convertir à l’islam en détention, de se radicaliser puis de devenir le premier jihadiste français jugé à son retour de Syrie.

Son séjour dans ce pays en guerre, Flavien Moreau, cheveux courts, rasé de près, ne le nie pas : il l’avait raconté, sous le nom de guerre de « Abdel Fattah », à un journaliste suisse rencontré côté turc de la frontière, qui l’avait rapporté dans un article du quotidien « Le Temps », sous le titre : « Les premières armes d’un jihadiste ».

Devant le tribunal, il raconte comment il a trouvé un passeur « qui nous a montré le chemin » jusqu’à Atmé, petit bourg syrien contrôlé par des katibas islamistes, où il achète, pour 1500 francs-suisses (1240 €) une kalachnikov, trois chargeurs et une centaine de balles (deux dollars pièce).

« Mais l’arme, c’était pour me défendre, c’est normal », dit-il. « C’est dangereux la Syrie, les journalistes s’y promènent avec des porte-flingues ». Il affirme n’avoir pris part à aucun combat, avoir fait « seulement de la surveillance, un peu de police, surveiller la katibas, les frères, c’est tout ».

« J’ai eu beaucoup de mal à ne pas fumer »

Il concède avoir appris le maniement de son pistolet-mitrailleur, quelques rudiments d’art militaire, comme comment se déplacer à la façon des commandos, mais rien d’autre.

« En fait, je ne suis resté qu’une dizaine de jours », assure-t-il. « J’ai eu beaucoup de mal à ne pas fumer, parce que fumer c’était interdit dans la katiba. J’avais emporté des Nicorettes, mais ça n’a pas suffi. Alors j’ai laissé mon arme à mon émir et je suis parti ».

Il est parti, est brièvement rentré en France (« j’avais prévu d’acheter une cigarette électronique ») mais n’a ensuite eu de cesse de tenter de revenir sur « la terre de Cham, la terre de jihad ».

Mais, repéré par la police turque puis par plusieurs services antiterroristes, il est constamment refoulé : Tunisie, Liban, Bulgarie, Allemagne, chaque fois que dans un aéroport un policier tape son nom dans un ordinateur, il est remis dans l’avion, interdit de territoire.

Suivi de près par les services antiterroristes français, il est placé sur écoutes. Les enquêteurs l’entendent ainsi dire qu’il cherche de faux papiers pour tenter à nouveau sa chance et décident, pour éviter qu’il ne leur échappe, en janvier 2013 de l’interpeller.


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Publié sur OSI Bouaké le mardi 21 octobre 2014

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