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Papouasie Occidentale : une approche ethnologique du VIH/SIDA

un article de médecins du monde


Mots-Clés / Ethnopsy

Mulia, district de Puncak Jaya, Papouasie-Occidentale

Après une première phase de recherche anthropologique auprès des populations Dani, Médecins du Monde intervient depuis 1998 au Puncak Jaya, au coeur des montagnes de la Papouasie Occidentale. Depuis septembre 2004, l’association développe un programme de santé primaire mettant l’accent sur la prévention du VIH   et des infections sexuellement transmissibles.

Une population isolée

La Papouasie Occidentale est l’une des 27 provinces de l’archipel indonésien et est devenue, après des années de transmigrations depuis les autres îles de l’Indonésie, une véritable mosaïque ethnique, linguistique et religieuse. Le district de Puncak Jaya, sur les hauts plateaux du centre de la province, est le moins développé et le plus isolé au niveau géographique. Il abrite 9 groupes ethniques différents, dont les Dani de l’ouest qui constituent le groupe papou majoritaire. Ces populations n’ont que difficilement accès à la santé du fait de l’éparpillement des villages, de l’absence d’infrastructures routières et de l’échec récent de la politique de décentralisation du système de soins. Par ailleurs, le clivage économique, social et culturel entre papous et non papous alimente la discrimination dont elles sont victimes. Ces difficultés d’accès aux soins sont aggravées par le conflit entre les indépendantistes et l’armée qui se traduit par la destruction des rares structures de santé, la désertion de la population et les grandes difficultés pour les équipes de MdM d’agir en dehors de la ville de Mulia.

La majorité de la population des hautes-terres de Papouasie Occidentale ignore encore jusqu’au nom du Sida  . Pourtant la dynamique de l’épidémie est aujourd’hui entrée dans une phase de progression rapide et les modes de transmission amènent l’ensemble de la population sexuellement active à être en situation de risque. Une récente étude de FHI (Family Health International) a confirmé que la Papouasie Occidentale enregistrait à elle seule 15% des cas de VIH   à l’échelle nationale alors qu’elle ne représente qu’1% de la population totale d’Indonésie.

Favoriser une approche spécifique intégrant les représentations socio-culturelles de la maladie

Le rapport de recherche anthropologique souligne également combien la société Dani a vu sa structure se modifier au gré de périodes charnières de son histoire. Chacune de ces étapes, synonyme de bouleversements religieux, politiques et économiques a eu un impact sur l’approche dani du corps social, mais également de la maladie et de sa transmission. « Sous la pression de l’évangélisation et une valorisation de la médecine occidentale, spécialistes et savoirs traditionnels tendent à disparaître », confirme Patricia Gaillard, responsable de la mission Papouasie. Les Dani ont perdu leurs représentations et pratiques traditionnelles sans pour autant avoir encore un accès satisfaisant à la médecine occidentale. L’irruption d’une pathologie telle que le VIH   exacerbe ce décalage et confirme l’absolue nécessité d’une prévention ciblée.

Alors comment conseiller l’usage du préservatif sans heurter les croyances religieuses ? Comment donner accès à l’information et à la prévention en s’adaptant au contexte socio-culturel d’une population disséminée sur un large territoire ?

C’est tout l’intérêt de ce volet VIH  , intégré à un programme de soins de santé primaire. “ La première de nos actions est la collaboration avec les personnels de santé du district qui ne sont pas conscients de l’ampleur du désastre et qui stigmatisent ces malades ” explique Patricia Gaillard. Dans cette région isolée, le poids de la religion reste très fortement ancré dans les mentalités et l’usage du préservatif est considéré comme une promotion des relations extra-conjugales. Les priorités sont donc d’assurer un accueil confidentiel des patients, une lutte contre leur discrimination et une information directe auprès de la population. Les équipes de Médecins du Monde ont ainsi élaboré des outils d’information, d’éducation et de communication, adaptés aux représentations socio-culturelles de la maladie afin de mieux sensibiliser les Dani. Parallèlement, l’association a proposé des formations aux acteurs locaux de santé, ce qui a permis de renforcer les compétences du bureau local de la Commission Nationale de lutte contre le VIH   (KPAD).

Fort de son expérience internationale dans le domaine de la prise en charge et de la prévention des infections sexuellement transmissibles et du Sida  , Médecins du Monde privilégie ainsi une approche ethnologique et intègre dans la démarche de prévention les représentations culturelles papoues.


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Publié sur OSI Bouaké le vendredi 8 décembre 2006

 

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