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Zambie : Des rumeurs de VIH dans les contraceptifs sèment la panique

Une méfiance envers les initiatives sanitaires et les médicaments étrangers basée sur l’histoire et l’expérience


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Lusaka, 7 février 2008 (Plusnews)

Une vague de panique en Zambie, provoquée par des allégations selon lesquelles des lots de Depo-Provera, un contraceptif injectable, contenaient le VIH  , a dévoilé la méfiance profonde et le degré de désinformation élevé des populations quant à l’innocuité des médicaments importés.

Selon le docteur Canisius Banda, porte-parole du ministère zambien de la Santé, ces allégations ont été formulées par un technicien de laboratoire qui travaillait dans un centre de santé public et avait décidé d’analyser le contraceptif, à base d’hormones, pour y déceler la présence éventuelle du VIH   après avoir remarqué que le médicament portait la mention « réservé à l’exportation ».

Les informations selon lesquelles le médicament pourrait être contaminé au VIH   ont semé la panique chez les femmes zambiennes qui reçoivent des injections de Depo-Provera trois fois par mois pour prévenir les grossesses, incitant le gouvernement zambien à retirer le médicament des centres de santé publics le temps de mener ses propres analyses.

En fin de semaine dernière, le docteur Brian Chituwo, ministre de la Santé, a annoncé que les analyses n’avaient jusque-là décelé aucune trace du virus, ajoutant qu’il fallait « également noter que le VIH   ne peut survivre dans [...] un environnement qui n’est pas propice au maintien de la vie ».

Le ministre a en outre expliqué que la mention « réservé à l’exportation » était apposée au médicament pour des raisons de contrôle fiscal et ne signifiait pas que celui-ci fût de qualité inférieure.

Christopher Wurst, porte-parole de l’ambassade américaine en Zambie a également insisté sur l’innocuité du Depo-Provera.

« Comme tous les médicaments distribués par le gouvernement américain, [le Depo-Provera] doit satisfaire aux normes de la Food and Drug Administration des Etats-Unis [...] les rumeurs sur la contamination du Depo-Provera sont simplement fondées sur des analyses de laboratoire erronées », a-t-il affirmé.

La Zambie est devenue un terreau fertile pour ce genre de rumeurs depuis que des consommateurs se sont vu délivrer des médicaments véritablement contaminés, l’année dernière.

La firme suisse Roche avait en effet rappelé son médicament antirétroviral Viracept dans plusieurs pays, et notamment en Zambie, après qu’il eut été découvert que plusieurs lots de médicaments contenaient un agent de contamination potentiellement nocif.

En août 2007, le gouvernement sud-africain avait également dû rappeler 20 millions de préservatifs après qu’il eut été découvert qu’un employé de l’organe d’assurance qualité et de normalisation du pays avait accepté de certifier des préservatifs défectueux en échange d’un pot-de-vin, versé par le fabricant.

Il est arrivé dans plusieurs autres pays d’Afrique, néanmoins, que des programmes sanitaires soient sabotés par la désinformation : dans le nord du Nigeria, les dignitaires religieux ont sapé les efforts entrepris pour vacciner les enfants contre la polio en suggérant que le vaccin contenait des agents de transmission du sida   et de la stérilité.

À la suite de cela, trois Etats du nord nigérian avaient interrompu leurs campagnes de vaccination contre la polio en 2004, et dans certaines régions, le recours aux vaccins est encore lent.

En Zambie, comme dans bien d’autres pays, la méfiance envers les initiatives sanitaires et les médicaments étrangers se conjuguent à des rumeurs persistantes sur les « vraies » origines du VIH  .

« Ils disent que le [VIH  ] a été créé pour éliminer la race noire », a expliqué à IRIN/PlusNews Raphaël Phiri de Family Health Trust, une organisation non-gouvernementale (ONG) locale. « À mon avis, les gens n’ont pas vraiment d’informations justes sur ces choses-là ».

« Il semble que ce climat de soupçon soit dû à la guerre biologique qui se déroule dans le monde », a commenté le docteur Banda, porte-parole du ministère zambien de la Santé. « Alors, les taux de sensibilisation ont augmenté au sein des communautés et celles-ci veulent obtenir l’assurance que les produits que nous leur donnons ne vont pas leur faire de mal ».

Aux termes de la loi zambienne, l’innocuité de tous les médicaments qui pénètrent sur le territoire zambien doit avoir été reconnue dans le pays de provenance ou par l’Organisation mondiale de la santé (OMS  ), a indiqué M. Banda.

La Zambie n’a pas la capacité de mener ses propres tests de sécurité sur tous les médicaments importés. « Pour l’instant, on ne teste qu’un peu plus de 40 produits, et le Depo[-Provera] n’en faisait pas partie », a-t-il déclaré.

L’Association de planification familiale de Zambie, qui offre des services de planification familiale, a suspendu l’utilisation du Depo-Provera jusqu’à nouvel ordre.

« Le gouvernement ne nous a pas encore donné d’instructions, mais il a indiqué que [ce médicament] devait être mis en quarantaine », a déclaré à IRIN/PlusNews Henry Kaimba, responsable opérationnel. « Je pense que les gens doivent obtenir des garanties, et que ces garanties doivent venir du gouvernement ».


Publié sur OSI Bouaké le dimanche 10 février 2008

 

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