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Kenya : Cultiver l’estime de soi dans les écoles d’agriculture


Burnt Forest, 25 mai 2010 - PlusNews - Les habitants des régions rurales du Kenya qui ont été touchées par les flambées de violence post-électorales de 2008 font partie des milliers de bénéficiaires d’un programme destiné à améliorer la sécurité alimentaire et les revenus des populations et à réduire la vulnérabilité des femmes à la violence sexiste par la formation à de meilleures techniques agricoles.

« L’insécurité alimentaire et la malnutrition figurent parmi les principaux problèmes liés à la propagation du VIH   et il est connu que lorsque les gens souffrent d’insécurité alimentaire, en particulier les femmes et les enfants, ils deviennent sujets à la violence sexuel et sexiste », a déclaré à IRIN/PlusNews Godrick Khisa, coordinateur national de ce projet, mené par l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO).

« Ce programme a pour but d’atténuer ce [risque] en dispensant des formations et en inculquant de meilleures méthodes agricoles aux plus vulnérables afin d’améliorer la production alimentaire ».

Plus d’un demi-million de Kenyans (dont une majorité dans la vallée du Rift, qui affiche un taux de prévalence du VIH   de 6,3 pour cent) ont été déplacés au cours des violences post-électorales qui ont éclaté au début de l’année 2008. Si la plupart d’entre eux ont désormais quitté les camps, ils ont eu peine à recouvrer leurs moyens de subsistance ; la crise alimentaire nationale de 2009 n’a fait qu’aggraver leur situation.

Formation

Selon son modèle d’Ecoles de la vie et des champs pour les agriculteurs jeunes et adultes et grâce aux fonds versés par l’Agence suédoise de développement international, l’Intervention régionale face à l’insécurité alimentaire, au VIH   et à la violence sexiste, un projet de la FAO, propose des formations agricoles et offre aux participants un forum leur permettant d’échanger leurs expériences et d’apprendre au contact les uns des autres.

Les communautés ciblées suivent des formations agricoles dispensées par des agents publics de vulgarisation dans divers domaines, notamment la gestion post-récolte, la sélection des semences et la gestion des sols ; elles reçoivent également des leçons sur la nutrition, les relations hommes-femmes et les droits de propriété. Les bénéficiaires reçoivent ensuite des subventions pour l’achat d’intrants agricoles, les formations et les visites d’échange.

Au début de l’année 2008, Wanjiku Maina*, mère de cinq enfants, a perdu son unique source de revenus lorsque des jeunes en maraude ont détruit son magasin, au cours des flambées de violence post-électorales qui ont éclaté à Burnt Forest, une ville de la vallée du Rift, une province du Kenya ; Wanjiku Maina a résisté à la tentation de se livrer au commerce du sexe pour joindre les deux bouts, mais elle a vu de nombreuses femmes y succomber.

« Je n’avais plus de quoi me nourrir, ni de quoi nourrir mes enfants ; je me suis tout simplement mise à faire la manche ; je dépendais des distributions effectuées dans les camps [de déplacés] », a confié Mme Maina, qui est atteinte du VIH  . « J’ai vu des gens vendre leur corps [pour se procurer de la nourriture] ... et j’ai bien failli en faire autant ».

« J’ai vu des gens vendre leur corps [pour se procurer de la nourriture] ... et j’ai bien failli en faire autant » Après avoir quitté le camp de déplacés et s’être installée ailleurs, Mme Maina a suivi une formation dispensée par la FAO ; aujourd’hui, elle cultive des pommes de terre d’Irlande et élève des poulets à des fins commerciales. « J’exploite ma petite shamba [ferme] pour subvenir à mes besoins et à ceux de mes enfants... Je peux produire mes propres vivres et en vendre une partie pour gagner un peu d’argent », a-t-elle expliqué. « Maintenant, je ne prends plus mes ARV   le ventre vide ».

Ce projet a permis d’aider plus de 7 500 bénéficiaires dans quatre régions du Kenya : Busia, Bondo et Eldoret, dans l’ouest, et Kwale, sur la côte est. Ces quatre régions affichent des taux élevés d’infection au VIH   et d’insécurité alimentaire, causés par la pauvreté et les communautés mobiles, notamment les touristes, les professionnels du transport et les populations de pêcheurs.

Emancipation

Peter Gitau, coordinateur chez Neighbours in Action, un organisme qui travaille auprès des communautés touchées par les violences post-électorales qui ont eu lieu à Burnt Forest, a constaté lui-même qu’un revenu modeste peut influer sur la capacité d’une femme à rejeter les avances sexuelles non désirées.

« Les personnes qui ont été déplacées pendant les flambées de violence sont particulièrement vulnérables ; pour les réinsérer dans la société, il faut aussi leur assurer une sécurité alimentaire », a ajouté M. Gitau. « Les gens se sentent plus forts lorsqu’ils ont les moyens de subvenir à leurs propres besoins ».

Selon Douglas Mbugua, un autre bénéficiaire du projet, ce dernier a aidé de nombreuses personnes atteintes du VIH   à retrouver leur estime de soi.

« Les gens respectent les séropositifs car ils sont considérés comme aussi productifs que les autres ; cela donne de l’espoir à d’autres, en leur montrant que le VIH   n’est pas la fin du monde », a-t-il commenté.


Publié sur OSI Bouaké le mardi 25 mai 2010

 

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