Bénin : Des mots d’enfants pour vaincre le rejet et la solitude

Publié le 15 décembre 2007 sur OSIBouaké.org

Cotonou, 12 décembre 2007 (PLUSNEWS)

Pour aider les populations à prendre conscience du drame que vivent souvent les enfants infectés ou affectés par le VIH  /SIDA   au Bénin, des media diffusent en boucle depuis trois mois des messages rédigés par des enfants et des jeunes dans le cadre d’un concours.

« Je suis orphelin du sida  . Par votre rejet, je me sens encore plus orphelin. Avec vous, j’ai de l’espérance et de l’avenir, acceptez-moi », plaide Marie-Carole Yambode, 10 ans, qui vit à Abomey-Calavi, non loin de Cotonou, la capitale économique, dans un message qui s’adresse à ses pairs.

« Tes parents sont victimes du sida  , qu’importe ! Tu restes toujours mon ami », lui fait écho celui de Sem Harris Ahouantchédé, 13 ans, de Porto-Novo, la capitale politique du Bénin.

Chaque jour depuis début septembre et jusqu’à fin décembre, dans le cadre d’un concours intitulé « Mots pour maux », des messages comme ceux-ci, rédigés par des jeunes âgés entre huit et 18 ans, infectés et affectés, ou non, par l’épidémie, passent en boucle sur les chaînes de radio et de télévision publiques, commerciales, rurales et communautaires de l’ensemble du pays, à l’initiative de la Fondation jeunesse épanouie, une ONG béninoise.

« Cette campagne a pour but d’intéresser les jeunes béninois au sort de leurs semblables pour qu’ils leur témoignent un peu d’affection et ce faisant, [qu’ils] contribuent au changement des mentalités vis-à-vis des malades, des personnes infectées et des [orphelins et enfants vulnérables] », a expliqué Raissa Gbédji, présidente de la Fondation jeunesse épanouie.

« Au-delà du choc causé par la maladie elle-même et la disparition d’un être cher, les enfants affectés et orphelins du sida   font l’objet de discriminations et vivent dans des conditions bien difficiles », a regretté Mme Gbédji, journaliste de profession. « L’appauvrissement des familles touchées par le VIH  /SIDA   favorise la vulnérabilité des enfants et le décès de l’un ou des deux parents compromet inévitablement leur avenir ».

Après une période de sensibilisation des enfants sur le VIH  /SIDA  , près de 200 messages ont été envoyés aux organisateurs par les enfants pendant la première phase de présélection du concours, qui a commencé en août, avant que le jury, composé de représentants du gouvernement, d’organisations internationales et nationales, n’en retienne 12 pour les diffuser sur les radios et télévisions.

Enregistrés en français et en fon, l’une des langues nationales les plus parlées au Bénin, ces messages entendent donc encourager les populations, et en particulier les jeunes, à lutter contre la stigmatisation des orphelins et enfants vulnérables du sida  .

Un public touché

Les auditeurs et téléspectateurs sont ensuite invités à voter par téléphone, internet ou par courrier, pour choisir le message qui les as le plus convaincu. Une opération qui semble trouver son public.

« J’ai voté pour un message qui m’a beaucoup touché », a expliqué à IRIN/PlusNews Odilon, 11 ans, un collégien de Cotonou, en faisant allusion à l’appel lancé par Marie-Carole Yambode. « J’ai trouvé qu’il était bien composé et j’ai demandé à ma maman de m’aider à exprimer mon suffrage par texto [téléphone portable] ».

Alain, frigoriste, a eu une vive sensation à la diffusion du message de Sem Harris Ahouantchédé, avant une édition du journal de 20 heures à la télévision nationale, et il a immédiatement décidé de voter, a-t-il dit à IRIN/PlusNews.

Comme beaucoup d’autres Béninois, Bénoît, journaliste dans une rédaction de radio à Cotonou, est aussi au rendez vous tous les soirs. « J’aime particulièrement le sens des messages et je m’étonne toujours positivement de la maturité de ces enfants », a-t-il noté, après avoir entendu le vibrant appel de Spéro Agomadjé.

« Victimes du sida  , nous le sommes ! L’avions-nous demandé ? Et pourquoi ce sort ? Alors chers parents, un regard d’amour et un demi-sourire pour plus d’un cour apaisé », plaidait le jeune Spéro Agomadjé, habitant d’Abomey, à l’intérieur des terres.

Ne plus être montré du doigt

Pour Mme Gbédji, la mobilisation générale autour de cette campagne est évidente.

« Le côté positif de ce projet est l’intérêt suscité auprès des enfants. Beaucoup nous ont appelé pour connaître l’évolution du projet », a-t-elle noté, se félicitant de la volonté des jeunes de participer à leur manière à la lutte contre l’épidémie et ses effets sur les communautés.

D’autre part, a ajouté Mme Gbédji, « les parents des enfants qui ont concouru se sont aussi montrés très disponibles, certains sont venus à l’enregistrement, [et] les supports réalisés pourront être utilisés pour d’autres campagnes de sensibilisation ».

La période d’intervention de cette campagne est doublement significative, a-t-elle expliqué. D’abord, ce sont les fêtes de fin d’année et les enfants ont plus que jamais besoin de l’assistance de leurs parents et de la communauté. Ensuite, elle englobe la date du 1er décembre, journée mondiale de lutte contre le sida  .

Les auteurs des trois messages ayant recueilli le plus grand nombre de suffrages se verront offrir des livres, et peut-être davantage si la Fondation trouve des moyens supplémentaires, tandis que les candidats suivants recevront des lots de consolation.

Mais ces récompenses ne sont pas le but ultime de ce concours, a rappelé Mme Gbédji.

Elle a exprimé l’espoir que cette campagne permette aux orphelins et enfants vulnérables « de vivre dans la société sans être montrés du doigt, [d’être] acceptés dans leur milieu et traités comme les autres enfants avec les mêmes chances de réussite ».

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