Le "patient de Berlin", seul homme à avoir guéri du sida
Publié le 12 août 2012 sur OSIBouaké.org
Le Monde.fr avec AFP | 26.07.2012 -
L’homme qui a guéri du SIDA par lemondefr
"Je suis la preuve vivante qu’on peut guérir du sida ". Testé positif au VIH en 1995, l’Américain Timothy Brown n’a plus montré de signe d’infection depuis 2007. Il est le seul cas connu au monde de guérison du sida, un phénomène inédit qui ouvre de nouvelles perspectives aux chercheurs.
Présenté dans la littérature médicale comme "le patient de Berlin", en référence à la ville où il a été soigné, ce miraculé a reçu une standing ovation, mardi 24 juillet, après avoir raconté son parcours de souffrance et d’espoir lors de la 19e conférence internationale sur la maladie, qui se tient jusqu’à vendredi à Washington. Avant lui, son "sauveur", Gero Hütter, hématologue à l’hôpital universitaire de la Charité de Berlin, a exposé devant l’assistance comment il a mis en œuvre son traitement.
0,3 % DE LA POPULATION RÉSISTANTE AU VIH
Deux fois, on a annoncé à Timothy Brown qu’il allait mourir : d’abord en 1995 pour sa séropositivité, puis en 2006 pour une leucémie. Lorqu’on lui présente ce patient voué à la mort, le Dr Hütter a l’idée de chercher parmi les donneurs de moelle quelqu’un qui ait des cellules immunitaires mutantes résistantes au VIH . Selon les estimations, 0,3 % de la population mondiale est doté de cette immunité naturelle qui provient de la mutation d’un gène dite "CCR5".
Cette mutation touche la "serrure" – le récepteur CCR5-d32 – qui permet au virus d’infecter les cellules – lymphocytes CD4 –, immunisant ainsi les porteurs contre le VIH . Une particularité génétique absente chez les populations asiatiques et africaines, présente essentiellement (à hauteur de 1 %) chez des populations blanches "autour de la mer Baltique et en Europe du Nord", a souligné le Dr Hütter.
Timothy Brown reçoit consécutivement en 2007 deux greffes de moelle osseuse : non seulement sa leucémie est vaincue mais, au bout de 600 jours, la charge virale est devenue indétectable. Son taux d’anticorps a baissé à un niveau témoignant de la disparition du virus. Un verdict confirmé depuis par de nombreuses biopsies.
DE NOUVELLES PERSPECTIVES
Le cas est historique, mais le Dr Gütter a tempéré les perspectives ouvertes par ce traitement, qui est certes une voie pour la recherche, mais ne peut être la solution curative pour les 34 millions de malades de la planète. Il n’y aurait tout simplement pas assez de donneurs pour les traiter, et la thérapie, mortelle dans un tiers des cas, est un véritable "enfer", a raconté Timothy Brown.
Il n’en demeure pas moins que l’espoir de pouvoir un jour guérir l’infection par le virus du sida repose sur ce 0,3 % de la population mondiale naturellement résistante, ont expliqué des virologues à la conférence. Le Dr Alain Lafeuillade du service d’infectiologie de l’hôpital Sainte-Musse de Toulon, organisateur du colloque, envisage même l’éradication de la maladie à moyen terme : "C’est la première fois que l’on démontre que c’est possible", s’enthousiasme-t-il.
Le scientifique évoque de nouvelles pistes en matière de traitement préventif ou de nouvelles thérapies fonctionnelles consistant à rendre le virus dormant sans prendre de médicaments toute sa vie.
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LA "COHORTE DE VISCONTI"
Outre le cas de Timothy Brown, une étude menée en France avec quinze patients de la cohorte dite "de Visconti" (Viro-Immunological Studies in Controllers after Treatment Interruption) a montré une éradication du virus. Ces derniers ont suivi un traitement antiviral dès le début de leur infection (8 à 10 jours après) et l’ont arrêté.
Plusieurs années après, leur charge virale reste indécelable et le niveau de leurs lymphocytes T4, cellules clés du système immunitaire, se maintient à des niveaux élevés. L’étude fera l’objet d’une présentation jeudi à la Conférence internationale de Washington.
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