Afrique du Sud : nouveau régime de PTME - le gouvernement sous pression

Publié le 29 janvier 2008 sur OSIBouaké.org

Johannesbourg, 25 janvier 2008

Les activistes sud-africains de la lutte contre le sida   ont appelé les médecins et les infirmiers à agir dans l’intérêt des femmes enceintes séropositives et des bébés qu’elles portent en elles en n’attendant plus l’adoption d’une directive officielle pour passer du traitement antirétroviral (ARV  ) unique au traitement combiné à base de deux médicaments, plus efficace pour la prévention de la transmission du VIH   de la mère à l’enfant (PTME  ).

Au cours d’une réunion du Conseil national sud-africain contre le sida  , en novembre 2007, la vice-présidente de l’Afrique du Sud et le directeur général du département de la santé ont annoncé que les centres de santé publics abandonneraient l’administration de névirapine au profit d’un traitement court à base de deux médicaments antirétroviraux (ARV  ) pour les femmes enceintes séropositives.

Près de deux mois plus tard, ces nouvelles directives en matière de PTME   n’ont pas encore été publiées et diffusées auprès des travailleurs de la santé des structures publiques. La bithérapie, actuellement administrée uniquement dans le secteur public de la province sud-africaine du Cap-Occidental, est deux fois plus efficace que la monothérapie pour réduire le risque de transmission de la mère à l’enfant, et est recommandée par l’Organisation mondiale de la santé (OMS  ) depuis août 2006.

Le docteur Tammy Meyers, pédiatre, a fait savoir, lors de la conférence de presse organisée mercredi par la Treatment Action Campaign (TAC) - groupe de lobbying pour la lutte contre le sida   - que le VIH   chez l’enfant était une maladie évitable depuis plus de 10 ans et que, malgré ses ressources et son expertise, l’Afrique du Sud était à la traîne, par rapport aux pays voisins, dans le déploiement de la bithérapie.

Frustration

Selon Mme Meyers, 90 nouveaux patients s’inscrivent chaque mois au centre pour enfants séropositifs qu’elle dirige à l’hôpital Chris Hani Baragwanath de Soweto, le plus grand bidonville de Johannesburg. « Et ceux-là ont eu la chance d’être découverts », a-t-elle ajouté. « La plupart meurent avant d’avoir jamais pu accéder à des services de traitement ».

Tandis que dans bon nombre de pays, le VIH   chez l’enfant a été quasi enrayé, la TAC estime que 60 000 bébés sont infectés par le VIH   chaque année en Afrique du Sud. Pour les experts, ce taux d’infection élevé a deux raisons : d’une part, l’Afrique du Sud n’est pas encore passée à la bithérapie, et d’autre part, les services de PTME   actuels sont peu mis à profit.

En effet, selon les statistiques de l’UNICEF pour 2006, de nombreuses femmes enceintes ne sont toujours pas soumises à des tests de dépistage du VIH   et seules 59 pour cent des femmes déclarées séropositives se voient administrer de la névirapine.

La Société sud-africaine des cliniciens VIH  , qui représente 14 000 membres exerçant dans le domaine du VIH  /SIDA  , a également publié un communiqué mercredi, exhortant le ministère de la Santé à finaliser les changements apportés au régime de PTME  .

« En Afrique du Sud, pays à revenu moyen où la majorité des femmes accouchent dans des structures publiques, le fait que les femmes séropositives se voient offrir un régime inférieur aux normes préconisées pour protéger leurs enfants reflète tristement [l’inefficacité de] notre système de santé », pouvait-on lire dans le communiqué.

Selon la Société, de nombreux travailleurs de la santé et services de santé provinciaux se sentent frustrés de ne pas avoir reçu l’autorisation officielle d’administrer ce nouveau régime, plus efficace. Certains ont même décidé de ne pas attendre d’obtenir l’autorisation, a révélé Nomfundo Eland, de la TAC. Son organisation offre un soutien, juridique et autre, à tout travailleur de la santé pénalisé par l’Etat « pour avoir agi dans l’intérêt des parents et de leurs enfants ».

Juste avant la conférence de presse, le ministère de la Santé a annoncé que le Conseil de santé national se réunirait vendredi pour « approuver » les nouvelles directives en matière de PTME  .

Pour les activistes de la lutte contre le sida  , le report de l’adoption d’un régime de PTME   plus efficace s’explique par l’absence de leadership de la part de Manto Tshabalala-Msimang, la ministre sud-africaine de la Santé, mais Sibane Mngadi, porte-parole du ministère de la Santé, a déclaré à un média d’information local que ce retard était dû au contraire à l’évaluation des coûts engendrés par ce changement.

La TAC a pris note de l’annonce du ministère de la Santé, mais s’abstiendra de tout commentaire avant d’avoir pris connaissance du nouveau protocole. Malgré tout, M. Mngadi a confirmé que les nouvelles directives ne prévoiraient pas la prescription d’un traitement de suivi à base de deux médicaments, administré aux femmes séropositives pendant une semaine, après l’accouchement, pour réduire le risque d’une résistance future aux médicaments ARV  .

« Pourtant, un groupe consultatif a vivement recommandé l’administration d’un traitement de suivi », s’est étonnée le docteur Meyers. « Je ne sais pas pourquoi ils ne l’ont pas retenu ».

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