Angolagate : la cour d’appel de Paris relaxe Charles Pasqua

11 ans de procédure judiciaire qui accouchent d’une souris, ce qui démontre que les réseaux d’influence sont encore bien opérationnels

Publié le 29 avril 2011 sur OSIBouaké.org

LeMonde pour Le Monde.fr | 29.04.11 | Pascale Robert-Diard -

C’est une victoire sur toute la ligne pour les principaux prévenus de l’affaire de l’Angolagate. La cour d’appel de Paris a relaxé l’ancien ministre de l’intérieur Charles Pasqua du chef de trafic d’influence qui lui avait valu une condamation à trois ans d’emprisonnement dont un ferme devant le tribunal correctionnel.

"La cour ne fait pas d’opportunité, elle fait du droit, cela peut intéresser certains observateurs", a tenu à préciser le président Alain Guillou. Après la relaxe dont il a bénéficié devant la Cour de justice de la République dans deux des trois dossiers dans lesquels il était poursuivi, c’est la condamnation la plus offensante pour lui qui disparaît. La cour n’a donc pas suivi le parquet qui avait requis trois ans avec sursis contre l’ancien ministre.

Elle a estimé que les débats devant la cour ont "définitivement établi la réalité de l’intervention" de Jean-Charles Marchiani et Arcadi Gaymadak dans la libération des pilotes de Bosnie et qu’en conséquence, l’octroi de la médaille du mérite à Arcadi Gaydamak, sur recommandation de l’ancien ministre de l’intérieur, n’était pas anormal.

Elle considère par ailleurs que le dossier d’instruction ne démontre pas "l’antériorité d’un pacte préalable" entre la remise de cette médaille à Arcadi Gaymadak par Jean-Charles Marchiani et le versement d’une somme de 1,5 million de francs au mouvement de Charles Pasqua. "On ne saurait tirer, comme l’a fait le tribunal, de la seule concomitance des dates entre la remise de la somme et celle de la remise de décoration un pacte de corruption préalable. Le processus choisi n’a rien d’anormal", estime la cour d’appel. Charles Pasqua avait une "absence totale de connaissance des modes de financement" de son mouvement politique, précise l’arrêt.

PIERRE FALCONE ET ARCADI GAYDAMAK AUSSI RELAXÉS

La même magnanimité a bénéficié aux deux intermédiaires Pierre Falcone et Arcadi Gaydamak. Tous deux étaient considérés comme les maîtres d’œuvre d’une vente d’équipements militaires à l’Angola dans les années 1990, pour un montant de 790 millions de dollars, gagés sur les recettes futures du pétrole de ce pays d’Afrique australe alors en guerre civile.

Condamnés en première instance à six ans d’emprisonnement ferme, ils ont été tous deux relaxés du chef de commerce illicite d’armes. La cour d’appel de Paris leur a donné raison sur ce point essentiel en reconnaissant qu’ils avaient agi sous l’autorité d’un "mandat d’Etat" décerné par l’Etat angolais et que par conséquent, les actes accomplis dans ce cadre échappent à la juridiction française puisqu’ils sont couverts par l’immunité. Elle considère qu’à l’époque des faits, l’Angola cherchait à "assurer sa survie" et que c’est "dans ce contexte et alors que la situation s’aggravait" qu’elle avait demandé à Pierre Falcone et Arcadi Gaydamak d’assurer son approvisionnement en armes. Les trois juges d’appel estiment que le "mandat" de l’Etat angolais est "incontestable", en dépit de l’absence de contrat écrit. Ils s’appuient sur les déclarations réitérées tant des prévenus que de l’Etat angolais lui-même sur ce point.

La cour a du même coup considéré qu’une large partie des abus de biens sociaux reprochés aux deux prévenus ne peut être retenue. "Nous avons fait le tri", a indiqué le président Alain Guillou. Pierre Falcone est condamné à trente mois de prison ferme et 375 000 euros d’amende et Arcadi Gaydamak à trente-six mois ferme et au même montant d’amende. M. Falcone, qui avait été arrrêté à l’audience devant le tribunal correctionnel, devrait donc sortir de prison dans les jours qui viennent.

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