Côte d’Ivoire : le camp Gbagbo empêche l’annonce des résultats

Publié le 1er décembre 2010 sur OSIBouaké.org

Libération - 01/12/2010 à 07h46

Après le second tour de la présidentielle, les proches du Président sortant contestent les chiffres de la Commission électorale indépendante qui a repoussé son annonce à ce mercredi matin.

La tension est montée mardi en Côte d’Ivoire, où des représentants du chef de l’Etat Laurent Gbagbo au sein de la commission électorale ont empêché physiquement l’annonce de résultats partiels du second tour de la présidentielle de dimanche qui l’opposait à Alassane Ouattara.

Alors que le porte-parole de la Commission électorale indépendante (CEI) Bamba Yacouba s’apprêtait à communiquer des premiers résultats partiels pour les régions du pays, l’un des deux représentants du président-candidat au sein de la commission, Damana Adia Pickass, lui a arraché les feuilles de résultats des mains avant de les déchirer. « Ces résultats sont faux, ils n’ont pas été consolidés ! », ont affirmé à plusieurs reprises les deux hommes, dénonçant un « hold-up électoral » devant de très nombreux journalistes.

Après cet incident, le porte-parole a assuré que ces résultats étaient « bel et bien consolidés », avant de s’éclipser entouré de gendarmes.

Promise pour plus tard dans la soirée, l’annonce de ces résultats a finalement été remise pour mercredi à 11h par un responsable de la CEI.

« Logique de confiscation du pouvoir »

Alors que la publication de ces données avait au départ été promise pour mardi matin, la Côte d’Ivoire a vécu sous tension toute la journée, au milieu des plus folles rumeurs. Six fois repoussée depuis la fin du mandat de Gbagbo en 2005, l’élection est censée clore une décennie de crises politico-militaires et la partition du pays depuis 2002 entre un sud loyaliste et un nord tenu par l’ex-rébellion des Forces nouvelles.

Le camp de l’ex-Premier ministre Ouattara avait, plus tôt mardi, accusé le président de chercher à « empêcher » la CEI d’annoncer les résultats. « Il est donc dans une logique de confiscation du pouvoir », a accusé son porte-parole Albert Mabri Toikeusse. « La victoire ne nous échappera pas », a-t-il martelé avant de demander à la CEI « d’assumer son indépendance ». Elle a officiellement jusqu’à mercredi soir pour proclamer les résultats provisoires.

Mardi matin, à la surprise générale, les techniciens de la télévision publique RTI avaient démonté le studio installé à la CEI à Abidjan, d’où les résultats devaient être annoncés. Les journalistes ont été invités sans explication à quitter le bâtiment, devant lequel s’étaient déployées des forces de l’ordre.

Le représentant de l’ONU  , Youn-jin Choi, s’est rendu brièvement dans la matinée sur les lieux où il a rencontré le président de la CEI, Youssouf Bakayoko, pour « encourager » la commission dans son travail, a dit le porte-parole onusien Hamadoun Touré. Appels « à la responsabilité et au calme »

Dans ce climat très tendu, la communauté internationale a donné de la voix. La secrétaire d’Etat américaine Hillary Clinton appelle à laisser publier les résultats et à agir « pacifiquement ». La Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) a exhorté « à maintenir la paix dans cette période très critique ». Le PS français, membre de l’Internationale socialiste comme le parti de Gbagbo, appelle chacun « à la responsabilité et au calme ».

Toute la journée, Abidjan a brui des rumeurs les plus folles et des quartiers avaient été quasi-désertés. Les forces de l’ordre s’étaient déployées à certains points stratégiques de la ville.

Le camp Gbagbo ne cesse de contester les résultats au nord, où leur rival Ouattara a régné en maître au premier tour le 31 octobre. Il veut y faire invalider les résultats dans au moins trois régions. L’ONU   comme plusieurs missions d’observation internationales ont pourtant jugé que le scrutin s’était globalement bien déroulé.

Signe de cette tension : chaque ex-belligérant était en train de rapatrier vers sa zone les éléments armés qui avaient été envoyés dans l’autre partie du pays pour sécuriser l’élection. Ainsi 1.500 soldats loyalistes redescendaient vers le sud, tandis que les 1.500 hommes des FN étaient en train de remonter vers le nord.

(Source AFP)

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