La collecte des eaux de pluies en Ouganda face au VIH/SIDA

Publié le 19 février 2009 sur OSIBouaké.org

19/02/2009 , Pierre MELQUIOT, sur www.actualites-news-environn...

La collecte des eaux de pluies a rendu vie à une communauté dévastée par le VIH  /SIDA   en Ouganda. La collecte des eaux de pluies dans les régions en Ouganda où l’eau est rare fait gagner du temps aux familles et leur évite d’avoir à acheter de l’eau potable à la ville la plus proche, selon une récent rapport de la Banque mondiale.

La construction de cuves en béton pour la collecte des eaux de pluies d’une capacité de 1 500 litres a par ailleurs créé des emplois et ouvert des débouchés aux orphelins des communautés locales. Les bénéficiaires ont assumé environ 6 % du coût des cuves, et ceux qui n’avaient pas les moyens de le faire ont reçu une aide de leurs voisins.

Agnes Nakalema est une mère célibataire de 26 ans qui vit dans le sud-ouest du district de Rakai, en Ouganda, où les premiers cas de VIH  /SIDA   du pays ont été signalés au début des années 80. Son mari est mort du VIH  /SIDA   il y a plusieurs années et elle s’est retrouvée veuve avec quatre enfants âgés de 4 à 10 ans. Mais Agnes, qui est bonne jardinière, voit la vie avec optimisme et dit qu’elle a bien des raisons d’être heureuse.

La collecte des eaux de pluies a rendu vie à une communauté dévastée par le VIH  /SIDA   en Ouganda.

En effet, elle n’est maintenant plus obligée de sortir de la concession pour aller chercher l’eau dont elle a besoin pour sa famille et pour la lessive, grâce à la cuve en béton de 1 500 litres construite pour recueillir l’eau de pluie par Uganda Rain Water Association (URWA), avec les fonds du prix du concours Development Marketplace décerné par la Banque mondiale. Avant la construction de la cuve, Agnes perdait de longues heures à aller chercher de l’eau, ou bien devait acheter des jerrycans de 20 litres qui pouvaient lui coûter jusqu’à 500 shillings ougandais (environ 0,30 dollar), chacun, selon la saison. Comme elle utilise en moyenne quatre jerrycans par jour pour elle et sa famille, cela représentait une dépense de plus d’un dollar par jour rien que pour l’eau.

« Il fallait que j’aille tous les deux jours chercher de l’eau à Kyotera. Cela me prenait cinq à six heures à chaque fois » explique en souriant Agnes. « Cela voulait dire que je ne pouvais pas gagner d’argent pour élever ma famille parce que je n’avais pas le temps de cultiver mon jardin ou ceux d’autres personnes. »

« La cuve a changé ma vie », explique Agnes. « Lorsqu’il pleut bien, elle se remplit d’eau propre que nous pouvons boire et utiliser pour faire la lessive. Maintenant, j’ai le temps de cultiver quelques jardins pour subvenir à nos besoins. Je gagne un peu d’argent et j’ai aussi le temps de faire pousser une partie de nos aliments ».

« Avant que nous ayons cette cuve, » explique Christine Nambi, âgée de 29 ans, et qui a vu la vie de sa famille transformée par une cuve de collecte des eaux de pluie, « la vie était tellement dure. Les enfants étaient obligés de manquer l’école et je ne pouvais pas cultiver mon jardin parce qu’il fallait qu’on aille chercher de l’eau. Cela valait mieux que de l’acheter à un vendeur parce qu’un jerrycan de 20 litres peut coûter jusqu’à 1 000 shillings ougandais (environ 0,60 dollar) pendant la saison sèche. »

Maintenant qu’elle peut se procurer l’eau dans la concession même, Christine a le temps de tenir l’échoppe qu’elle a installée avec un petit capital apporté par son mari pour vendre quelques produits d’épicerie de base : du sel, du sucre, de la poudre de curry, de la farine de maïs et des haricots. Elle gagne environ 40 000 shillings ougandais (24 dollars) par mois ce qui, dit-elle, est un bon supplément à ce que gagne son mari, qui est chauffeur de taxi. Elle estime que les cinq membres de sa famille ont une meilleure qualité de vie grâce à la cuve de collecte des eaux de pluie.

« Je peux maintenant laver nos vêtements, mes enfants sont propres et je fais pousser des aliments dans mon jardin » explique Christine. « Je mène une vie plus calme et je suis très reconnaissante à URWA de ce qu’elle a fait pour moi ».

Agnes Nakalema et Christine Nambi font partie des 546 bénéficiaires des cuves de collecte des eaux de pluie installées dans le district de Rakai par URWA ; celle-ci a utilisé le montant du prix mondial Development Marketplace décerné par la Banque mondiale, soit 198 200 dollars, pour poursuivre, sur une période de deux ans, un projet de collecte des eaux de pluie sur les toitures en faveur de ménages touchés par le VIH  /SIDA   et la tuberculose dans les districts de Rakai et de Masaka où l’eau manque.

Le projet, qui a pris fin l’année dernière, a permis de construire au total 1 100 cuves. Les bénéficiaires, dont plus de 90 % sont des femmes (veuves pour la plupart) ont, chacune, dû verser 30 000 shillings ougandais (environ 18 dollars) sur un montant total 183 000 shillings ougandais (110 dollars) pour obtenir la construction d’une cuve filtrante qui leur permet d’avoir de l’eau propre. Étant donné la gravité du problème d’approvisionnement en eau propre dans les deux districts, la majorité des bénéficiaires se sont empressés de verser leur contribution, et les mieux nantis ont aidé des voisins plus démunis à réunir les fonds requis.

Le projet a permis, non seulement de collecter de l’eau propre, mais aussi de former des maçons et des apprentis qui ont, de surcroit, gagné de l’argent en construisant les cuves. Certains d’entre eux ont choisi d’en faire de leur métier. La plupart des apprentis étaient des orphelins qui avaient dû quitter l’école parce qu’ils ne pouvaient pas payer les droits de scolarité. Le projet a également promu une amélioration de l’hygiène et un climat de bonne entente en mettant fin aux querelles opposant certains membres de la communauté qui se disputaient l’eau.

Les autorités des districts ont noté que ce programme est l’un des plus efficaces au plan des coûts auxquels ils aient jamais participé, et ils ont l’intention de demander au bailleurs de leur apporter un appui supplémentaire pour étendre la portée du projet aux personnes âgées et aux groupes de population pauvres et nécessiteux.

« Ce projet est l’un de ceux qui a apporté le plus à notre circonscription » a expliqué Edward Mugerwa, chef du conseil municipal de la circonscription de Nabisaga, dans le district de Rakai, en parlant de l’initiative des cuves de collecte d’eau. « Nous sommes toutefois tristes de savoir que le projet a pris fin parce que l’eau est l’un des problèmes les plus graves dans le district. Si seulement nous avions deux cuves de plus dans chacun des 38 villages dans notre circonscription, nous serions plus que satisfaits. ».

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