Afrique de l’ouest : Associer davantage la personne infectée au VIH à son traitement

Publié le 27 mai 2005 sur OSIBouaké.org

DAKAR, 26 mai 2005 (PLUSNEWS) - La prise en charge des personnes vivant avec le VIH  /SIDA   est vouée à l’échec si les patients ne sont pas associés à leur propre traitement, ont dit des médecins lors d’un atelier de l’organisation mondiale de la Santé (OMS  ) à Dakar.

Le traitement antirétroviral est voué à l’échec si le patient n’est pas impliqué », a dit à PlusNews Wilfried Akame, coordinateur du centre de traitement agréé de Limbé, dans la province du sud-ouest au Cameroun.

Dans de nombreux cas, « la thérapie a échoué par le passé parce que le patient était considéré comme quelqu’un qui n’a aucune autorité, qui ne peut prendre aucune responsabilité », a t-il ajouté.

Organisé du 16 au 25 mai dans la capitale sénégalaise, l’atelier de l’OMS   a réuni des médecins et des personnes vivant avec le VIH   venus de 10 pays francophones d’Afrique de l’ouest et centrale sur le thème de la prise en charge intégrée des maladies de l’adolescent et de l’adulte.

Parmi les raisons — autres que financières- évoquées par les participants à cet atelier pour expliquer l’abandon d’une thérapie figurent entre autres le manque d’information du patient sur le traitement et ses effets, ainsi que l’ignorance de critères propres à chaque patient, comme son environnement professionnel et familial.

Pourtant, selon Palokinam Pichie, chargé de la formation sur la prise en charge thérapeutique des personnes séropositives au Togo, « l’interaction [entre médecin et patient] est nécessaire pour que le patient comprenne l’intérêt de continuer le traitement le restant de sa vie ».

Pour Alassane Zoungrana, médecin chargé de la prise en charge des personnes vivant avec le VIH   au Burkina Faso, cette interaction se justifie aussi par la lourdeur du traitement.

« On ne peut pas être un policier posté devant le patient, nous lui demandons d’être son propre policier », a dit Zougrana. « Le patient doit donc être parfaitement informé pour qu’il puisse continuer à prendre ses médicaments ».

L’apparition d’effets secondaires par exemple, est considérée comme l’une des causes d’abandon du traitement. Ils peuvent se manifester sous forme de vomissements, de céphalées aigües (migraines), mais aussi par des infections dermiques.

« Les effets secondaires laissent des marques, des stigmates sur le patient, et par conséquent peuvent accentuer la stigmatisation », a dit Palokinam Pichie du Togo.

« Tout être humain prend des médicaments pour guérir et pas pour voir d’autres maladies se développer sur son corps », a t-il ajouté.

Limamou (un nom d’emprunt) travaille au centre de traitement ambulatoire de Dakar. Selon lui, le plaidoyer en faveur de la participation des personnes infectés par le virus dans leur prise en charge a reçu un écho au Sénégal.

Aujourd’hui, affirme Limamou, grâce à l’interaction entre patients et médecins, l’immense majorité des patients respectent la prise des médicaments. « Les autres ne prennent pas régulièrement les ARV   à cause du rejet familial ou parce qu’ils ne veulent pas que leurs collègues voient les médicaments », a t-il dit.

« Nous leur suggérons de les prendre même dans les toilettes, pour que la prise de médicaments soit régulière et continue », a précisé Limamou.

Pour être efficace, un traitement ARV   doit être pris à des heures régulières, ce qui justifie selon Akame du Cameroun, que le traitement soit adapté au mode de vie des patients et pas le contraire.

« Le médecin doit par exemple savoir quand le patient peut prendre ses médicaments en fonction de ses occupations journalières », a dit Akame.

Lorsque les contraintes professionnelles ou sociales des personnes sous traitement ne facilitent pas le respect d’horaires réguliers, il faut trouver d’autres repères temporels.

« L’OMS   a développé des symboles culturels auxquels le patient peut se référer pour prendre régulièrement ses médicaments ARV   », a dit Georges Alfred Ki-Zerbo, chargé des soins et des traitements pour le programme régional de l’OMS  . « Il peut se référer aux heures de prière par exemple, s’il est dans un environnement religieux à prédominance musulmane ».

« La référence aux heures de prière est très efficace quand on doit prendre les ARV   trois fois par jour, à huit heures d’intervalle », a confirmé Raphaël Diatta, un patient venu de Ziguinchor dans le sud du Sénégal, un pays musulman à 95 pour cent. « L’heure de prise tombe exactement sur ’Fajr’ la prière du matin, ’Dhor’, la prière du début d’après-midi, et ’Isha’, celle de la nuit ».

Les médecins se référent de plus en plus aux activités quotidiennes des patients pour prescrire le traitement à suivre, ont dit plusieurs personnes vivant avec le VIH  , présentes lors de l’atelier.

« Les médecins suggèrent à ceux qui voyagent de prendre un stock de médicaments avec eux et d’écouter la radio, ou de porter une montre pour ne pas oublier leur prise », a ajouté Diatta. « Même les pêcheurs amènent leurs médicaments en mer ».

IRIN PLUSNEWS 26 MAI 2005

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