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« Le discours LGBTphobe a retrouvé de la puissance en 2016 », selon SOS Homophobie



Libération - Catherine Mallaval - 10 mai 2017 - Dans son 21e rapport, l’association indique avoir reçu 1 575 signalements en un an, un chiffre en augmentation de 20% par rapport à l’année précédente.

"Frappe-le ce travelo, lui et sa pute ! » « La vie de ma mère, faites pas ça à côté de moi, sales PD ! » « T’aimes ça lécher, hein sale gouine »… Malaise. Grosse gêne à la lecture du 21e rapport de SOS Homophobie qui dévoile ce mercredi un état des lieux chiffré de la lesbophobie, la gayphobie, la biphobie, la transphobie en France. Sur quelque 170 pages – le rapport est aussi épais que le malaise – y défilent des témoignages de femmes et d’hommes insultés, rejetés, parfois même violentés physiquement dans un pays devenu il y a quatre ans (le 17 mai 2013 précisément) le quatorzième Etat à ouvrir le mariage et l’adoption à tous.

Les chiffres sont là, en appui des coups reçus : en 2016, après deux années consécutives de baisse, les témoignages de LGBTphobie ont connu une augmentation de 19,5% (1 575 signalements à SOS Homophobie). Les trans sont parmi les premières victimes de cette inflation de la surenchère (+76% de témoignages), la biphobie a presque doublé, tandis que l’homophobie quotidienne subie dans la famille, l’entourage proche, les lieux publics, à l’école ou au travail demeure très importante. Mises bout à bout, les insultes (et autres) proférées à l’encontre des LGBT dans des contextes de proximité représentent près de 60% des cas signalés. Dans le même temps, Internet demeure le principal canal de la LGBTphobie.

Absence de statistiques officielles

Certes le rapport annuel de SOS Homophobie n’est pas une radiographie scientifique avec échantillons représentatifs, puisqu’il ne s’appuie que sur les appels et signalements de plaintes des LGBT. Mais en l’absence de statistiques officielles, et dans l’attente que la Délégation interministérielle à la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la haine anti-LGBT (Dilcrah) – qui a vu son champ élargi aux LGBT l’an passé – ne rende publiques les plaintes de la gendarmerie et police, il permet de prendre le pouls. Pourquoi bat-il si fort ?

Le terreau anti-LGBT a-t-il vraiment fait des pousses ? Joël Deumier, président de SOS Homophobie : « Le discours LGBTphobe a toujours existé. Il a connu une flambée lors du mariage pour tous. Et il a retrouvé de la puissance en 2016, quand la Manif pour tous a tenté de se restructurer pour mieux réexister. Il y a également eu une porosité avec le mouvement Sens commun qui soutenait le candidat Fillon. Certes, il s’agit d’une minorité. Mais d’une minorité bruyante qui pèse, notamment via les réseaux sociaux. A l’arrivée, leurs propos ravivent la haine. Et encouragent aussi des gens qui ne sont pas forcément homophobes à embrayer. »

« Quand le législateur fait montre de considération, les gens s’autorisent davantage à parler »

A l’inverse, les lois en faveur des LGBT, telle la récente possibilité pour les trans de changer plus facilement de sexe à l’Etat civil, n’incitent-elles pas les insultés à témoigner davantage dans un élan « vous n’avez plus droit » ? « Si, aussi, commente Joël Deumier. Quand le législateur fait montre de considération, les gens s’autorisent davantage à parler, à franchir le cap ». Joël Deumier réfute l’idée d’une France dramatiquement encrassée dans la LGBTphobie. Et de citer moult sondages dans lesquels les Français se disent favorables à l’ouverture de la procréation médicalement assistée aux lesbiennes (et aux célibataires) ou de plus en plus à l’aise avec les familles homoparentales, et toutes les sortes de familles. Ce cocon chéri des Français n’étant pas, loin de là, le seul « bien » des réacs… Ainsi aussi, moult Français ont assisté, émus, au discours et aux pleurs d’un homme rendant hommage en direct des Invalides à son compagnon, le policier Xavier Jugelé, mort le 20 avril lors de l’attentat des Champs-Elysées. Seul Jean-Marie Le Pen a alors osé publiquement se déclarer « un peu choqué » par cet « hommage à l’homosexuel ».


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Publié sur OSI Bouaké le dimanche 23 juillet 2017

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