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"Dallas Buyers Club rend hommage aux activistes gays des années 80”



OSI Bouaké - 3 oscars ont récompensé ce film aussi inattendu que courageux, qui raconte un moment historique de la mobilisation des malades. Du grand cinéma.

Télérama - Caroline Besse - 23 janvier 2014 -

Rencontre avec Jean-Marc Vallée, réalisateur

Grâce à Dallas Buyers Club, en salles ce mercredi 29 janvier 2014, la carrière du Canadien Jean-Marc Vallée a fait un pas de géant. Après C.R.A.Z.Y. et Café de Flore, son nouveau film triomphe en cette saison de prix et de tapis rouges : Matthew McConaughey et Jared Leto enchaînent les récompenses et attendent fébrilement les Oscars, où ils espèrent décrocher respectivement les statuettes de « meilleur acteur » et de « meilleur acteur dans un second rôle ».

Le film a également été nommé dans la catégorie « meilleur film » de la plus prestigieuse des cérémonies de cinéma. Car Dallas Buyers Club est typiquement le genre de films « à Oscars » : inspiré d’une histoire vraie, il raconte celle de Ron Woodroof, un électricien fan de rodéo à la vie sexuelle dissolue. Jusqu’au jour où il s’effondre, et que le diagnostic tombe : il est atteint du sida   et il ne lui reste que trente jours à vivre.

Celui qui pensait que le sida   n’était qu’une « maladie de tapettes » refuse d’admettre la sentence, et se lance dans une épopée pour trouver un traitement qui va rendre plus supportable son quotidien de malade, et celui de centaines d’autres. En fondant son buyers club à Dallas, où les personnes contaminées pouvaient se procurer des médicaments non autorisés par la FDA – l’agence américaine des produits alimentaires et médicamenteux –, et notamment des compléments nutritionnels, qui les soulagaient, il a prolongé son espérance de vie et celle de beaucoup de monde.

Nous avons rencontré Jean-Marc Vallée dans un hôtel parisien, une semaine avant la sortie du film en France. Avec son léger accent québécois, il nous a rappelé comment la communauté malade du sida   a dû se battre pour avoir accès à des traitements alternatifs à l’AZT, le seul qui existait alors. Une époque où la pandémie débutait, ravageant la communauté homosexuelle mais pas seulement, en faisant la une des journaux.

Est-ce que vous considérez que Buyers Dallas Club comme un film politique ?

Ce n’était pas l’intention de départ mais il l’est aussi. Le film rend hommage aux activistes gays des années 80 qui ne sont plus avec nous, et qui ont fait la différence. C’est grâce à eux qu’aujourd’hui l’accès aux traitements a changé. Le sida   est toujours là, et même si la trithérapie existe, le combat n’est pas terminé. On a mis beaucoup de bâtons dans les roues de cette communauté. Ces gens-là, ces combattants ont fait la différence. Et encore aujourd’hui, on a beau dire qu’on change, l’homosexualité est encore taboue. Regardez ce qu’il s’est passé dernièrement chez vous… On sort dans les rues pour dire non au mariage gay.

Avez-vous regardé beaucoup de films sur le sida   avant le tournage, comme Philadelphia ou Jeanne et le garçon formidable ?

J’ai seulement regardé le documentaire de David France, How to survive a plague, [prix du meilleur film au New York Film Critics Circle Awards en 2012 et nominé aux Oscars du meilleur documentaire en 2013, ndlr]. Ce documentaire, c’est un peu l’histoire de Ron, avec encore plus de détails. Dallas Buyer’s Club est une fiction basée sur le combat de Ron, mais même si les personnages autour de Ron sont fictifs, c’est très fidèle à ce qu’il a vécu.

Avez-vous éprouvé des difficultés à monter ce film ?

Le seul obstacle qu’on ait eu concerne le scénario. Il y a deux écoles de pensée sur le sida  , et le scénario flirtait avec les deux. Une première école minoritaire – notamment le biologiste allemand Peter Duesberg – conteste l’idée de la responsabilité du VIH   dans le sida  . J’ai senti qu’il valait mieux qu’on prenne position en s’appuyant sur une école ou une autre, et on a décidé de suivre la majorité, c’est-à-dire l’école qui dit que le VIH   cause le sida  . Autrement, ce qui a été difficile c’est qu’on avait peu de moyens et peu de jours de tournage : vingt-cinq en tout.

Comment filmer un sujet aussi difficile que le sida   ?

C’est un sujet dur et cruel. Le monde dépeint est assez cru… Comment ne pas tomber dans le pathos ? On savait qu’on avait certaines scènes qui étaient délicates à tourner, car c’est facile de faire pleurer, en sortant les violons. Je n’ai pas voulu tourner beaucoup de gros plans et être interventionniste. Il faut mettre un peu d’humour pour contrebalancer le truc, en voulant faire rire ou sourire.

Qu’est-ce qui vous a donné envie de réaliser ce film ? L’histoire de Ron ou celle des buyers club ?

Ron a eu l’idée de créer un buyers club après avoir entendu parler de celui de New York, le tout premier. Il y en a ensuite eu un en Floride, puis à San Francisco. Celui de Ron, à Dallas, est arrivé après. Mais c’est surtout l’histoire de Ron qui m’intéressait : c’est un antihéros, un underdog… une belle crapule, mais qu’on aime suivre, comme Randle Patrick McMurphy dans Vol au-dessus d’un nid de coucou, qui a tous les défauts du monde, et que finalement tu veux sauver et aimer : c’est ce qui m’a plu dans le scénario.

Car c’est le réflexe de survie de Ron qui l’amène à être généreux, mais ce n’était pas son intention. Il se dit : « Je suis devenu un expert en la matière, je suis devenu mon propre médecin, je me rends compte que je vais mieux, du coup je vais me faire du fric avec ces grandes folles, je vais leur faire payer à ces salauds, ou plutôt ces salopes. » Il fait donc ça avant tout pour l’argent, et finalement il ne se rend même pas compte qu’il devient le porte-parole d’une communauté qu’il a traînée dans la boue toute sa vie.

Pourquoi avoir choisi Matthew McConaughey pour ce rôle ?

Au début, je n’étais pas du tout convaincu, car je n’étais pas fan de Matthew et de ses choix de carrière. Je ne pouvais pas croire que cet homme musclé qui s’occupe aussi bien de son apparence puisse incarner Ron, mais la productrice m’a convaincu de le rencontrer. J’ai voulu lui faire confiance, on s’est apprivoisés, et après trois heures de rencontre, on s’est dit « let’s go ». Je me suis dit « Putain, j’espère qu’il va perdre ses kilos, et qu’il ne sera pas trop beau ». Mais je n’ai rien eu besoin de faire, et quand je l’ai vu arriver sur le tournage… « Oh ! mon dieu ». Matthew incarne Ron à merveille, car non seulement il le joue, mais il est ce personnage. Tu n’es pas censé l’aimer tout de suite, ce salaud, et en fait au bout de cinq minutes, tu es séduit. A travers Ron, ce film rappelle combien on peut être bête et lumineux à la fois.

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  • Dallas Buyers Club, un film réalisé par Jean-Marc Vallée, Avec Matthew McConaughey, Jennifer Garner, Jared Leto - Durée : 1h57 - Date de sortie en France : 29 janvier 2014

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Publié sur OSI Bouaké le lundi 3 mars 2014



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