Arnaques forestières au Congo

Greenpeace dénonce l’évasion fiscale orchestrée par les compagnies forestières européennes

Publié le 12 août 2008 sur OSIBouaké.org

Alors qu’une prise de conscience se fait au niveau du rôle de la déforestation dans le réchauffement climatique, nous avons découvert que les plus grandes entreprises d’abattage opérant dans le Bassin du Congo, tout en détruisant une des forêts les plus importantes de la planète d’un point de vue écologique, pratiquent l’évasion fiscale et escroquent la population congolaise.

Le Bassin du Congo contient la deuxième plus grande forêt tropicale au monde. Elle est non seulement d’une importance inestimable en terme de biodiversité et de ressources pour la population locale mais aussi une gigantesque réserve de carbone, essentielle à la protection du climat. A ce jour, 25 % de ce précieux écosystème est déjà sous le contrôle de l’abattage industriel, en premier lieu en République Démocratique du Congo et en République du Congo, deux pays qui souffrent d’une corruption endémique.

Dans le nouveau rapport Arnaques au Congo Greenpeace montre comment des entreprises telles que le groupe germano-suisse Danzer escroque chaque année la population de ces pays d’énormes montants dûs au titre de divers impôts.

Leur stratégie

Danzer a mis en place un système élaboré de blanchiment de ses béniéfices par lequel la filiale suisse du groupe (Interholco AG) achète du bois bien en dessous du prix du marché à ses entreprises soeurs (Siforco et IFO) et place ensuite les bénéfices sur des comptes bancaires à l’étranger. En agissant ainsi, le groupe Danzer évite de payer d’importantes sommes dues en vertu des taxes à l’exportation et de l’impôt des sociétés.

Ce comportement sans scrupules semble être représentatif de l’ensemble de l’industrie forestière au Congo. Nous avons pu constater que le montant des pertes de ces gouvernements, provenant du groupe Danzer uniquement, atteindrait presque 8.000.000 d’euros. Cela représente le prix de vaccins d’environ 700.000 enfants congolais en dessous de l’âge de 5 ans ou 50 fois le budget annuel opérationnel du Ministère de l’environnement en RDC.

Bien d’autres abus

L’année dernière, Greenpeace a publié le rapport Le pillage des forêts du Congo qui démontrait le chaos social et la destruction environmentale causés par le secteur de l’abattage du bois et pointait du doigt Danzer pour commerce illégal de bois, corruption et relations d’affaire avec des individus figurant sur la liste noir du Conseil de sécurité des Nations Unies pour trafic d’armes.

Ces pratiques sont un sérieux obstacle au développement du pays et anéantissent les efforts réalisés par la communauté internationale pour lutter contre la pauvreté. Ironiquement, alors que beaucoup de gouvernements continuent d’’investir des millions dans la reconstruction de la RDC après la guerre, ils ignorent les conséquences des entreprises sur place qui pillent les ressources naturelles, contribuant ainsi au changement climatique et privant la communauté locale d’un emploi durable.

La Banque mondiale échoue dans l’objectif de contrôler l’expansion de l’abattage industriel du bois et l’amélioration de la gouvernance dans ce secteur. Certains bailleurs de fonds envisagent même de donner des aides aux entreprises forestières.

Il y a également de l’abattage de bois illégal au Parc national de Salonga, la plus grande réserve de forêts primaires au Congo

Solutions

Le secteur a clairement besoin d’une législation plus sévère et d’un contrôle efficace du respect de cette législation. En mai 2002, le gouvernement congolais avait annoncé un moratoire sur l’octroi de nouvelles concessions et le prolongement ou l’extension des concessions existantes. Greenpeace demande au gouvernement congolais de maintenir ce moratoire et d’annuler toutes les concessions octroyées en violation du moratoire. Une révision des titres forestiers par le gouvernement va avoir lieu mais ce processus doit être plus transparent.

Les bailleurs de fonds internationaux ne doivent pas soutenir l’industrie forestrière. Les fonds publics devraient être utilisés pour financer le contrôle de l’industrie et le développement local. Les entreprises occidentales avides de profit et dont les comptes bancaires étrangers débordent ne méritent pas de recevoir une aide internationale.

Les revenus générés par les forêts en tant que puîts de carbone pourraient être bien plus grands que ceux générés par l’abattage industriel. La déforestation représente environ 1/5 des émissions de gaz à effet de serre au niveau mondial. Remplacer l’abattage industriel en RDC par un système de protection internationale représenterait un avantage financier pour les populations locales et ferait du Congo un pays clé dans la sauvegarde du climat.

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