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Pour un monde sans sida



Est Républicain - 23 Février 2012 - « IL EST MORT de la pelle et de la pioche » : dans les années 1980, c’est ainsi, raconte Françoise Barré-Sinoussi, que l’on répondait en Centrafrique à la question « de quoi est-il mort ? » pour éviter de prononcer le mot « sida   » qui faisait peur. Depuis, beaucoup de chemin a été parcouru mais les combats contre la maladie, contre les discriminations, contre l’obscurantisme, pour la prévention, pour la mobilisation des pouvoirs publics et des financeurs de la recherche sont loin d’être terminés.

Dans un livre d’entretiens qui paraît ce jeudi, « Pour un monde sans sida   » (1), la chercheuse de l’Inserm et de l’Institut Pasteur, nobélisée en 2008 pour la découverte début 1983 du virus de l’immunodéficience humaine (VIH  ), responsable du sida   (syndrome d’immunodéficience acquise), retrace une histoire passionnante, faite d’angoisses, de joies, d’espoirs mais aussi d’inquiétudes.

Sous nos latitudes, le sida   n’est plus mortel grâce aux thérapies, c’est une pathologie chronique. Alors, un « monde sans sida   », est-ce possible ? Hier, FBS nous répondait : « Si on traitait la maladie, oui, dans les années 2050, mais en fait, on est loin d’avoir tous les patients sous traitement. Et il y a la crise économique et le désengagement financier de certains pays. Et puis, il faut arriver à atteindre les patients dans toutes les régions du monde ». Le prix Nobel craint aussi « l’émergence de virus qui résistent aux traitements ».

La « chercheuse activiste », comme on la surnomme parfois dans le monde associatif, évoque aussi cette « peur des gens de se faire dépister » qui perdure. Et de résumer : « Il reste énormément d’obstacles alors qu’on a les outils » pour se battre contre le fléau.

Concernant la recherche vaccinale (vaccins thérapeutique et prophylactique), Françoise Barré-Sinoussi se montre de la plus grande « prudence » : « En recherche, on ne peut pas avancer de date et il va falloir de multiples essais ». Elle sait toutefois « le côté positif des échecs » et que les scientifiques ont « une approche plus rationnelle avec de nouveaux outils ».

Activiste, FBS l’est sûrement, notamment avec ses engagements auprès des associations comme Sidaction et son inlassable désir de faire bouger les lignes. Car, dit-elle, il ne faut pas baisser la garde et « nous devons nous tenir prêts pour faire face à l’urgence de nouvelles menaces sanitaires ». Pour ce qui est de la France, elle a « l’impression que le sida   intéresse moins, que le grand public croit que tout va bien : le traitement, la prévalence de la maladie ». Elle alerte cependant avec force : « On voit redémarrer l’épidémie. Je m’inquiète pour les jeunes adolescents, ça fait très peur et il y a moins de communication. Quant aux homosexuels, ils s’infectent à nouveau ». Mme Barré-Sinoussi admet pourtant que « la France, deuxième grand donateur au Fonds mondial de lutte contre le sida  , a encore un atout : un budget spécifique stable pour l’ANRS (Agence Nationale de Recherche sur le Sida   et les hépatites) ». Mais elle plaide pour que la taxe sur les transactions financières – dite Tobin – ne soit pas détournée de ses objectifs et qu’une partie aille bien à la santé.

Après les fastes de Stockholm en décembre 2008, les réalités demeurent donc et les pelles et les pioches de la recherche n’ont pas fini de creuser leur sillon…

Frédéric MENU

Françoise Barré-Sinoussi, « Pour un monde sans sida   – Un combat partagé ». Broché : 169 pages, ISBN-13 : 978-2226230690, Albin Michel, 17,50 €. Les droits d’auteur et les bénéfices seront intégralement reversés à l’Institut Pasteur et à Sidaction.

Bio express

30 juillet 1947 Naissance à Paris

1974 Doctorat d’Etat en sciences

1975 à ce jour INSERM

1988 à ce jour Institut Pasteur

1983 Découverte du VIH  

2005 Direction de l’Unité « Régulation des Infections Rétrovirales » (Institut Pasteur)

6 octobre 2008 Prix Nobel de Médecine avec Luc Montagnier pour la découverte du VIH  


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Publié sur OSI Bouaké le jeudi 23 février 2012



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