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L’idéologue des Khmers rouges reconnaît sa responsabilité dans le génocide



Libération - 30 mai 2013 - L’idéologue du régime des Khmers rouges, Nuon Chea, jugé pour génocide, crimes de guerre et crimes contre l’humanité, a admis pour la première fois jeudi sa responsabilité dans une entreprise de mort qui a fait quelque deux millions de morts entre 1975 et 1979.

Ancien numéro deux du régime, Nuon Chea, 86 ans, est l’un des deux derniers accusés encore jugés, après le décès en mars de Ieng Sary, ministre des Affaires étrangères de Pol Pot, à 87ans. « Je ne cherche pas à fuir mes responsabilités », a-t-il déclaré au cours de son procès devant le tribunal international de Phnom Penh, alors qu’il avait rejeté jusqu’à présent toutes les charges pesant contre lui.

« En tant que dirigeant, je dois assumer ma responsabilité dans le préjudice causé à mon pays, le danger auquel il a été exposé », a-t-il ajouté, exprimant « ses plus profondes condoléances » aux témoins qui ont déposé et qui ont perdu des proches pendant le régime de terreur imposé par les Khmers rouges. Nuon Chea a cependant minimisé son rôle en expliquant qu’en tant que responsable de la propagande et de l’éducation, il n’était pas informé de tout.

« Sur le plan de l’exécution (des desseins de Pol Pot), je n’avais aucun pouvoir. Et donc s’agissant de ce qui s’est passé sous les Khmers rouges, il y a des choses que je savais, et d’autres que j’ignorais », a-t-il assuré. Il a ajouté un peu plus tard : « J’éprouve du remords pour les crimes commis intentionnellement ou non intentionnellement, que j’en aie eu connaissance ou non. »

Des survivants ont salué ces déclarations. « C’est une bonne chose. Il accepte sa responsabilité », s’est félicité Bou Meng, 72 ans, un des rares détenus à être sortis de la prison de Tuol Sleng à Phnom Penh. « Je suis très content. Finalement, il admet les massacres et son erreur ». Un compagnon de l’époque, Chum Mey, 83 ans, a estimé que ces expressions de contrition publique apaisaient sa colère contre les accusés. « Il revient maintenant au tribunal de se prononcer sur sa culpabilité ».

Nuon Chea n’est plus jugé qu’avec Khieu Samphan, chef de l’Etat du « Kampuchéa démocratique », âgé de 81 ans. Ieng Thirith, ex-ministre des Affaires sociales et veuve de Ieng Sary, a pour sa part été libérée. Elle a perdu la raison et a été déclarée inapte à être jugée. Khieu Samphan a lui aussi présenté « ses excuses sincères » aux victimes jeudi. Mais il a aussitôt juré qu’il ignorait à l’époque « les grandes souffrances » des Cambodgiens, allant jusqu’à « condamner fermement les actes odieux » perpétrés par le régime des Khmers rouges et souhaité que « leurs auteurs (soient traduits) en justice ».

Khieu Samphan « doit accepter sa responsabilité. Lui et Nuon Chea sont comme les deux doigts de la main », a réagi Bou Meng. Le régime khmer rouge a tué un quart de la population du Cambodge en moins de quatre ans (1975-79), vidant les villes, supprimant la monnaie, la religion et l’éducation, et plongeant la société dans la terreur et la paranoïa. Le seul procès achevé depuis l’entrée en fonction en 2006 du tribunal parrainé par l’ONU   est celui de Kaing Guek Eav, alias Douch, patron de la prison de Phnom Penh. Il a été condamné à la perpétuité.


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Publié sur OSI Bouaké le jeudi 30 mai 2013

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