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Congo Brazzaville : La "vie positive" d’un couple de séropositifs



Syfia - El-Staël Enkari - Juin 2010 - Valérie et Thierry Maba sont tous deux séropositifs. Heureux et résolument optimiste, le couple combat la maladie au quotidien et les préjugés qui l’entourent en partageant son expérience. Pour que les malades retrouvent espoir et cessent d’être discriminés.

"Ici, à la maison, nous parlons tous du sida  … Sauf le nouveau-né bien sûr !", plaisante Thierry Maba, 38 ans. Thierry a l’air en bonne santé. La voix ferme, il donne des ordres que son entourage s’empresse d’exécuter. Sa femme Valérie, elle aussi séropositive, vient de donner naissance à un bébé bien portant.

À Brazzaville, on ne présente plus Valérie et Thierry. Le couple est en effet devenu le miroir dans lequel se reconnaissent des malades, mais aussi des personnes saines. Leur courage et leur optimisme montrent aux Congolais qu’être séropositif ne signifie pas la fin de tout. "On peut vivre en couple positivement et heureux, même infecté par le VIH  ", soulignent les amoureux. Pour montrer que le sida   ne tue pas l’amour, Valérie et Thierry ont été les premiers séropositifs à se marier officiellement au Congo en 2005. "Il fallait partager notre expérience", déclare Thierry. Depuis, ils partagent leur expérience de vie commune à travers différentes campagnes de sensibilisation.

Tout débute en 1991, quand Thierry obtient une bourse d’études après son baccalauréat. Lors du bilan de santé, il apprend qu’il a le sida  . Cette découverte bouleverse à jamais sa vie. "Quand j’ai eu mes résultats, je me suis confié à un ami. Je ne voulais pas que mes parents l’apprennent", se souvient-il. Quand ces derniers finissent par le savoir, une barrière s’érige entre eux et leur enfant. "Au départ, j’ai été rejeté, mais aujourd’hui ils ont compris que le sida   est une maladie comme une autre", estime-t-il.

Les jeunes, "couche la plus vulnérable"

Tous les jours, Thierry discute avec les gens de sa maladie : "C’est une question de vie", résume-t-il. Pour mieux véhiculer son message, le couple a réalisé un documentaire, Une vie positive, présenté au public en décembre 2009, au Centre culturel français de Brazzaville. "Ce film est le seul vrai moyen de sensibiliser d’autres personnes, qu’elles soient saines ou séropositives", affirme Thierry, désireux, dans le même élan de donner ou redonner espoir aux malades. Vice-président de l’Association des jeunes positifs du Congo (AJPC), il mène aussi cette mission à travers cette OSC créée par sa femme en 2002 et qui accompagne psychologiquement et socialement les séropositifs et lutte à leurs côtés pour leurs droits.

Thierry met un accent particulier sur les jeunes, "couche la plus vulnérable" selon lui, pour que ces derniers soient correctement informés sur le virus. Un combat particulier que partage Attaque contre la prostitution infantile, la drogue et le sida   (ATTAC3). "Nous insistons auprès des jeunes sur l’importance de connaître cette maladie et d’en parler à ceux autres qui l’ignorent", explique Sosthène Nganga, président de ATTAC3. Son association a lancé, depuis 2005, une opération de vulgarisation des préservatifs chez les jeunes. En 2008, plus de 800 d’entre eux ont été informés. "Sur une tranche de 50 personnes, 22 étaient séropositives", confie Sosthène avant de conclure : "Il nous faut faire des efforts, en informant et en conseillant les jeunes. Le VIH   n’est plus un sujet tabou !"

La preuve ? Les mentalités commencent à évoluer. "J’ai été stigmatisé, mais aujourd’hui, mes voisins ont un nouveau regard sur moi lorsque nous nous croisons", se réjouit Thierry. Certaines personnes estiment ainsi désormais qu’"il n’est pas question de rejeter les séropositifs. Ce sont des personnes comme nous. Nous qui nous croyons sains, nous sommes tous des ignorants", déclare par exemple un infirmier.

Valérie et Thierry ont montré la voie. Le fait de connaître et de ne pas cacher sa séropositivité, "a permis une avancée significative dans la lutte contre le sida   au Congo", affirmait George Moyen, ministre chargé de la Santé, durant la compagne de lutte contre cette maladie en décembre 2009. Associée à d’autres actions, cette prise de conscience produit ses effets. Dans leur rapport conjoint de 2009, l’OMS   et l’Onusida   estiment que le taux de prévalence du VIH   chez les Congolais adultes (de 15 à 49 ans) est de 3,2 % contre 7,2 % en 2002.


Publié sur OSI Bouaké le samedi 3 juillet 2010

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